Le manteau rouge

12 juin 2025 – La dame au manteau rouge

Elle passe tous les mardis à la même heure. Toujours seule. Toujours ce manteau rouge, un peu trop voyant pour son âge, mais bien coupé. Elle ne regarde personne. Pas qu’elle soit hautaine — c’est autre chose. Une manière d’évoluer dans la rue comme on suit un fil invisible.

Le sac cabas change parfois. Celui d’aujourd’hui est clair, avec des dessins. Des fruits ou des lettres, on ne sait pas très bien. Il semble vide ou presque. Elle ne fait plus de grosses courses, probablement. Juste de quoi tenir. Ce n’est pas une de ces dames bavardes qu’on voit au marché, celles qui s’attardent chez le fleuriste ou cherchent la conversation au coin d’un banc.

Elle s’est arrêtée un instant devant *Le Petit Moulin*. Le café est fermé depuis longtemps, mais elle s’y arrête toujours. Pas pour lire les autocollants ou contempler la peinture. C’est automatique. Elle ralentit, ajuste son sac, reprend son souffle peut-être. On dirait qu’elle attend quelque chose. Mais non, elle repart.

Il y a chez elle une précision tranquille. Comme si tout était réglé, chaque rue, chaque marche, chaque geste. On a l’impression qu’elle pourrait faire ce trajet les yeux fermés.

Personne ne lui parle. Les habitués la reconnaissent, la laissent passer. Elle ne dérange pas. Elle ne demande rien. Mais elle est là. Et ceux qui font attention savent qu’elle ne manque jamais un mardi.