Un coup^le discute dans le métro

15 juin 2025 – Et pour les vacances?

Ils ne parlaient plus depuis quelques stations déjà. Pas par dispute. Plutôt cette économie de mots que seuls les couples durables maîtrisent. Lui scrutait son téléphone avec l’air inquiet de ceux qui n’y trouvent jamais ce qu’ils cherchent. Elle fronçait les sourcils, plongée dans un guide touristique, comme si le paragraphe en question lui avait personnellement manqué de respect.

Lui portait une doudoune orange, usée mais encore vaillante, et un pull à col roulé tricoté main — sans doute un vieux souvenir d’hiver à la montagne. Elle, emmitouflée dans un manteau noir, son écharpe rouge glissée sous le menton, tenait le guide comme un avocat tient une preuve accablante.

Peut-être un voyage en préparation. Peut-être un désaccord discret sur l’itinéraire, ou un doute quant à leur arrêt. Mais ils ne se disputaient pas. Ils n’avaient plus besoin de ça. Il y avait entre eux ce fil silencieux, un fil solide, tissé de jours ordinaires.

Dialogue : "Comme d’habitude"

— Tu réalises que les Cinque Terre, c’est cinq villages perchés, avec des escaliers partout ?
Elle ne lève même pas les yeux du guide. Juste un froncement de sourcil, le coin de la bouche qui tremble. Il sait qu’il l’agace, c’est presque rassurant.

— Je te signale qu’il y a aussi des bateaux.
— Et moi je te signale que j’ai le mal de mer.

Il soupire, regarde son téléphone.

— Et le lac de Côme ? Moins de monde, plus tranquille…
— Tranquille ? Tu rigoles ? On va croiser George Clooney à chaque virage. Tu vas encore passer ton temps à comparer nos vies.

Il sourit. Touché. Mais il ne lâche pas.

— Et Florence ? Culture, musées, gelati…
— La dernière fois que t’as mis les pieds dans un musée, c’était parce qu’il pleuvait à Lisbonne.

Le métro freine. Silence. Les néons clignotent un peu. Ils se regardent, enfin.

— Bon… on fait quoi ?
— Comme d’habitude. On choisira dans le train.

Ils sourient en même temps. Match nul. Et vacances en vue.